Sommaire

Observations et précisions faites par courriel le 16 septembre 2005 par Mme Annik Flaud (habitant au Chambon)
sur le paragraphe "4.1. Le-Chambon-sur-Lignon, village sauveur"
Chapître III - Juifs et chrétiens, du mémoire de Céline MARROT-FELLAG ARIOUET
"Les enfants cachés pendant la seconde guerre mondiale aux sources d'une histoire clandestine"
Retour à la page d'origine

Bonjour,
 
Voici quelques remarques sur le texte concernant Le Chambon : pour quelques-unes, c'est une erreur purement factuelle ; pour d'autres, c'est plus le résultat de recherches et réflexions personnelles.
 
Pour commencer, "Livaret" : il s'agit du Vivarais, ancienne province qui recouvre à peu près l'actuel département de l'Ardèche.
 
"Chaque villageois a en moyenne accueilli un Juif" : Je dirais plutôt "chaque famille".
En effet, on sait grâce aux recensements, en particulier, que le village comptait 2800 habitants (protestants à plus de 90%). Et que la "Montagne Protestante" (Le Chambon + les autres villages) comptait approximativement 8000 Protestants. Et si on ne sait (et qu'on ne saura sans doute jamais) combien de Juifs, enfants comme adultes, ont trouvé refuge ici, permettez-moi de retenir le chiffre avancé par le Pasteur Trocmé : de 3000 à 3500. On arrive au chiffre "fétiche" de 5000 en ajoutant les réfugiés politiques, les Espagnols et les réfractaires au STO. On trouve, au surplus, des "pensionnaires" dont on peut se demander comment ils sont arrivés là : un Iranien et un Tonkinois, une Paraguayenne ...
 
En fait, la "vulgate" a été induite en erreur par Philip Hallie et Pierre Sauvage (né sur le Plateau en avril 1944) : ils ont trouvé que "5000 enfants juifs sauvés par 5000 protestants" constituait un excellent slogan. C'est possible mais c'est complètement faux !
 
L"influence "des Pasteurs Trocmé et Theis" : Ils ont joué un rôle important, bien sûr, mais ils n'ont pas été les seuls ! Tous les pasteurs, sans exception, ont prêché pour l'accueil et ont accueilli eux-mêmes dans leurs presbytères. Ils l'ont fait souvent avec des mots très forts, comme le pasteur Bettex, dans un sermon prononcé en chaire, à Freycenet, le 16 août 1942 (un mois jour pour jour après la rafle du Vel d'Hiv) : Les mesures prises contre les Juifs sont illégales. La conscience ne peut que se révolter à l'égard de telles mesures. Notre devoir est de les secourir, de les cacher et de les sauver par tous les moyens possibles, je vous engage à le faire. D'autres personnes devraient être citées, comme André Philip et sa femme, Mireille, Charles Guillon, ancien pasteur et maire du Chambon, qui eut un rôle très important depuis Genève où il s'était réfugié, sans hésiter à faire des incursions en France et même au Chambon, Roger Darcissac, le directeur du Cours Complémentaire, etc ...
 
"André Trocmé d'origine allemande" : en fait, si la mère d'André Trocmé était bien allemande, son père et toute sa famille paternelle étaient français. Mais il est vrai que des visites à sa famille maternelle en Allemagne lui ont permis de suivre la montée du nazisme et d'en tenir informé sa communauté chambonnaise mais aussi les pasteurs de toute la région. Il y a plusieurs articles dans le journal protestant local "L'Echo de la Montagne" concernant le sort du Pasteur Niemöller et l'Eglise Confessante allemande. Et il en est allé de même pour l'Italie où André Trocmé et son épouse se rendaient pour visiter la famille de cette dernière. Ils ont donc eu le double "privilège" de pouvoir observer la montée du fascisme en Allemagne et en Italie !
 
"André Trocmé prononce un discours intitulé Les Armes de l'Esprit". Il ne s'agissait pas d'un discours mais d'un sermon au culte du dimanche. Et il y a eu deux prédicateurs : André Trocmé et Edouard Theis qui partageaient les mêmes idées sur la non-violence et l'objection de conscience. Permettez moi d'ajouter que rares furent à l'époque, les pasteurs et les prêtres catholiques à prêcher sur la résistance, même spirituelle. J'en ai retrouvé environ 5 ou 6 dont le pasteur Roland de Pury de Lyon, un pasteur de Nîmes, etc...
 
"Ce centre (le Coteau Fleuri) fut également une plaque tournante pour les passages clandestins en Suisse".  Je crois qu'on peut dire que toutes les organisations oeuvrant dans la région ont eu leur propre réseau de passage en Suisse, même si Mireille Philip se  chargeait de leur meilleure coordination. C'est ainsi que plusieurs pensionnaires des maisons du Secours Suisse furent convoyés en Suisse grâce à Auguste Bohny.
 
"Oscar Rosowski arriva au Chambon en septembre 1942 : il est venu en décembre. Le hameau où il avait trouvé asile était "La Fayolle".
 
"Madeleine Dreyfus, en contact permanent avec le pasteur Trocmé". En fait, Madeleine Dreyfus a rencontré le pasteur Trocmé, sur les conseils d'une relation lyonnaise, en septembre 1942, après la Nuit de Vénissieux. Le pasteur Trocmé l'a présentée à une paysanne des Tavas, Mme Déléage. Et c'est avec cette dernière et sa fille, Eva, que Madeleine Dreyfus parvint à trouver, avant son arrestation en novembre 1943,  un refuge pour une centaine d'enfants cachés dans des fermes. Mme Déléage et sa fille se chargeaient de trouver des familles d'accueil et aussi de la surveillance des enfants. Après l'arrestation de Madeleine Dreyfus, c'est André Chouraquui, réfugié dans le hameau de Chaumargeais à Tence, qui fut chargé des enfants de l'OSE sur le Plateau.
 
Les étudiants des Roches : Ce sont très exactement 18 étudiants qui ont été arrêtés le 29 juin 1943, + Daniel Trocmé, le cousin du pasteur. En fait, la plus jeune des personnes déportées, Charles Stern, n'avait pas 15 ans mais 17.
 
Voilà, j'ai fini mon laïus. Depuis un certain temps, je me suis rendu compte qu'il fallait être le plus précis possible dans l'histoire du Chambon pour éviter que deviennent réalité des faits inexacts. Comme les "5000 enfants juifs sauvés par 5000 chambonnais !
 
Désolée d'avoir été aussi longue !
 
Annik Flaud

Sommaire - Introduction - I Enfants cachés, enfants en danger - II Les organisations juives - III Deux organisations laïques - IV Juifs et chrétiens - V Le réseau Marcel dans la région de Nice - VI La Maison de Sèvres - VII Conclusion - VIII Bibliographie - Iconographie


Haut de page

Caravelle (lino)